Une transmission réussie à la Ferme de la Guilbardière à Monthou-sur Bièvre !

MathieuAgriculture, AlterTour, Centre-Val de Loire, Edition 2020

Après 55 km de vélo à slalomer sur les routes du Loir-et-Cher entre éclaircie et petit pluie, nous arrivons à la Ferme de la Guilbardière. Nous sommes accueillis par Gilles, Anne, Bertrand, Melaine, Mathieu, Emily et Mélanie. Après avoir installé nos tentes à côté de l’enclos des cochons, l’équipe nous présente l’histoire de la ferme et sa transmission qui a de quoi faire rêver plus d’un·e candidat·e·s à l’installation, voilà la chronologie du projet :

En 1986, Gilles s’associe avec son père en production de lait cru : 35 vaches sur 70 ha de pâtures. Au fur et à mesure Gilles convertie la ferme en agriculture biologique.

En 1995, Anne s’associe à Gilles et monte deux nouveaux ateliers : la transformation du lait en faisselle et l’accueil pédagogique.

En 2015, Bertrand rejoint l’équipe et lance un atelier de fabrication de pâtes sèches et fraîches. Il cultive et transforme 3 tonnes de blés anciens par an : « J’ai fait une école d’agro puis je suis devenu ouvrier agricole, puis j’ai lancé mon projet. »

En 2016, Melaine devient salarié de la ferme sur l’élevage, la transformation et les cultures : « Je travaillais dans un CIVAM en Mayenne et j’avais besoin de mettre les mains dans la terre »

En 2017, Mathieu devient à son tour salarié de la ferme sur l’élevage, la transformation et les cultures : « Je suis fils de paysan et je ne pensais pas devenir éleveur un jour. »

En 2019, Emily entre en stage sur la ferme. Elle prépare alors un Brevet Professionnel d’Exploitation Agricole (BPREA) elle fait de la transformation laitière (faisselle et fromage frais) et de l’accueil pédagogique sur la ferme : « Plutôt urbaine au départ,  j’avais dans l’idée de vivre dans une ferme mais pas forcément d’y travailler. De fils en aiguille je me suis formé à la transfo »

En 2019, Mélanie rejoint l’équipe et créé un atelier de cueillette et de production de plante aromatiques et médicinales : « j’ai un parcours éduc pop, je travaillais au MRJC. J’envisageais de développer mon activité exclusivement sur de la cueillette sauvage parce qu’il y a déjà de quoi faire avec le sureau, le tilleul, le mélilot, l’acacia, l’aubépine, la primevère officinal, le pissenlit, l’alliaire, le lamier pourpre, l’ortie, le gaillet gratteron, le noisetier, le lierre terrestre, la matricaire, l’achillée, l’églantier, l’ail des ours, la ronce, le rosier sauvage… J’ai finalement, en plus de la cueillette sauvage mis en culture une petite surface sur la ferme sans serre avec de la menthe, des rosiers, du romarin, de la mauve, du laurier, du bleuet, du souci, de l’hysope, de l’agastache, de la mélisse, de la lavande, de la sauge sclarée… ». Mélanie connais bien l’AlterTour, elle a été participante sur l’édition 2014 !

Quand en 2019, Anne et Gilles décident de céder la ferme. Bertrand, Melaine, Mathieu, Emily et Mélanie lance une réflexion sur la reprise.

Le 1er avril 2020 : Bertrand, Melaine, Mathieu et Emily créent un Groupement Agricole d’Exploitation en Commun (GAEC). Il·elle·s maintiennent leurs activités respectives et s’entraide pour permettre à chacun·e de prendre des congés et des vacances.

De son côté, Mélanie est en Coopérative d’Installation en Agriculture Paysanne (CIAP) avec 10 autres entrepreneurs à l’essai répartis sur le territoire. La CIAP lui permet de tester son activité agricole en situation réelle. Elle est encadrée dans les domaines comptables, administratifs et juridiques. Au bout de deux ans elle aura le choix de devenir salarié de la CIAP en CDI, de rejoindre le GAEC ou de lancer son entreprise. Elle cultive et fait de la cueillette plantes sauvages qu’elle transforme en tisanes, pesto, confits et sels aromatiques. Pour plus d’infos sur l’activité de Mélanie, vous pouvez la suivre sur Mémé dans les Orties.

Photo de Luca Bon

Nous travaillons sur la qualité de nos produits.

« Sur la ferme, nous avons un système de séchage en grange pour garder les nutriments du foin. Le bâtiment est équipé d’une griffe, le foin entre dans la grange par le haut. Il y a des capteurs d’hygrométrie pour mesurer l’humidité de foin. Quand il est trop humide, on active la soufflerie qui projette de l’air par le bas. Mélanie a installé ses séchoirs à plantes à côté de la soufflerie, ce qui améliore le processus de séchage. En complément, chaque séchoir contient un déshumidificateur afin d’optimiser le processus.

Sur la Ferme, chaque atelier est inter-dépendant : l’accueil pédagogique, l’élevage, la culture, la transformation et la livraison qui englobe plusieurs ateliers. Nous nous relayons et nous nous aidons sur chaque atelier. »

On s’adapte et on avance

 « On est sur un salaire égal pour chaque membre du GAEC. On avait pour objectif de se rémunérer à 1200€/mois par personne. Avec le COVID-19 on a pris peur et on se verse finalement 600 €/mois. En avril 2021, nous réévaluerons la situation en fonction du bilan de l’année.
On a gardé le système de distribution des cédants : le magasin à la ferme, les marchés, les Associations de Maintien de l’Agriculture Paysanne (AMAP) et les magasins à Blois (3 livraisons par semaine) : Biocoop, Leclerc, Cora. Le covid à stopper les marchés, il y a eu des adaptations dans les AMAP. On livrait du vrac à l’origine, on nous a demandé de livrer en pots. Pour les magasins nous n’arrivions pas à suivre la demande pendant le confinement, ça a beaucoup ralenti après. Le magasin à la ferme à bien fonctionné, ça faisait une petite sortie pour les gens. Du côté du temps de travail, les vaches et la culture représentent la part la plus importante, ensuite vient l’accueil pédagogique , la transfo laitière : 3 transfo par semaine, puis les pâtes : 3 à 4 transfo par semaine. »

On décide ensemble !

« Pendant 6 mois on a réfléchit à nos fondamentaux, à notre rythme de vie, au projet, au chiffrage… deux d’entre nous étaient salariés de la ferme. Nous avons eu le temps de réfléchir aux aménagements, aux travaux. Nous louons les terres à une 15aine de propriétaires terriens dont les cédants. Le bâtiment d’accueil a été financé par un Groupement Foncier Agricole (GFA) de plus de 200 personnes. L’investissement collectif est de 164500 €, deux Altercyclistes présent·e·s sur l’étape sont membre du GFA. Ça permet de trouver du financement, de faire du lien avec les citoyens et d’être plus crédible vis à vis des banques. Les bâtiments agricoles ont été achetés par le GAEC. Nous avons tous 25% des parts. Nous décidons ensemble et nous intégrons Mélanie même si elle n’est pas encore dans le GAEC. Nous cherchons à être tous d’accord pour prendre une décision. Si une personne a une objection elle doit faire des propositions alternatives jusqu’à ce que le groupe soit d’accord. Le collectif se réunis tous les lundis, nous débutons chaque réunion avec un tour météo. Nous évitons aussi les non-dits et nous prenons en considération les humeurs de chacun·e. A la fin de chaque réunion nous faisons un tour des pépites (points positifs) et boulettes (points négatifs) sur la réunion. Nous avons cœur que chaque membre du collectif soit entendu. Nous avons suivi une formation avec les cédants sur les non-dits, la communication entre eux et nous. Nous allons être accompagnés par une personne du GFA une fois par an pour faire le point notre situation individuelle dans le groupe. »

Après deux jours sur place, nous repartons avec des souvenirs pleins la tête : échanges, visite, ateliers collectifs, moment festifs. Longue vie à la Ferme de la Guilbardière !

Mathieu

Photo de Luca Bon