Stéphane et Anna : le maraîchage bio et engagé à Longecourt les Culêtres

JonasAgriculture, AlterTour, Bourgogne-Franche-Comté, Edition 2020

A peine avons nous enclenché le frein à main de l’Iveco que Stéphane, maraîcher des Jardins de Longecourt, nous prévient: “Ils ont annoncé de la pluie dans la soirée. Ce serait vraiment bien pour nos légumes qui souffrent de la chaleur”.
A la nuit tombée, le tonnerre résonne au loin et les éclairs zèbrent le ciel tout autour de nous. Ils dessinent des zigzags impressionnants dans la nuit noire. La pluie se met à tomber et nous nous carapatons dans la grange pour profiter des films diffusés par l’association Cinécyclo.
Le lendemain matin, la fraîcheur laisse rapidement place à une chaleur étouffante. Dans les planches de cultures de Stéphane et Anna, nous nous activons pour arracher les mauvaises herbes au milieu des carottes et des céleris. Entre novices du maraîchage nous nous félicitons que la pluie de la nuit ait ameubli la terre, avant d’apprendre que les trois gouttes tombées n’ont pas changé grand chose à la sécheresse et que Stéphane avait en fait arrosé les légumes pour nous faciliter la tâche.

L’amour de la terre

Le maraîchage, cet écologue qui a travaillé dans des Parc Naturels Régionaux, a “mis la main dedans” à son retour d’un voyage de six mois en Amérique du Sud en 2010. Pendant plusieurs années, il s’est formé chez des confrères avant de s’installer avec sa compagne Anna à Longecourt les Culêtres en 2016. “Au début, les gens ont un peu rigolé de voir des maraîchers s’installer dans un pays d’élevage”, se souvient Stéphane, “Puis ils ont vu qu’on travaillait et nous avons gagné leur confiance”.
Aujourd’hui, Stéphane, Anna et leur salarié (à mi-temps) cultivent 10 hectares de légumes bio en appliquant la rotation des cultures et d’autres principes issus de la permaculture. Tomates, poivrons, courges, oignons, panais etc… Au fil des ans, Anna et Stéphane ont diversifié leur production. Un atout qui nécessite une certaine polyvalence. “Cultiver plusieurs légumes, c’est un peu comme si un éleveur élevait plusieurs races d’animaux. Cela nécessite de s’adapter aux besoins, aux maladies et aux ravageurs qui varient d’une espèce à l’autre”, précise Stéphane. Cette année par exemple, le maraîcher a dû faire face aux taupins qui ont détruit quasiment l’ensemble de ses courges. Pas de quoi le décourager: “On a mis des patates dans les trous pour attirer les taupins, on les a enlevées et on a replanté les courges”.
Côté intrants, Stéphane utilise des amendements locaux comme les tourteaux de ricin (également répulsif contre les campagnols), le crottin de leurs chevaux, du compost, des purins et des préparations de plantes médicinales réalisées en partenariat avec la ferme voisine qui produit des plantes aromatiques et médicinales.
Aujourd’hui, Stéphane et Anna écoulent leur production uniquement en vente directe à la ferme, sur le marché, dans des AMAP, grâce au système des paniers et enfin dans des magasins bio pour le surplus.

Maraîcher et élu municipal

Malgré ses journées bien remplies, Stéphane est un maraîcher engagé. Militant de Greenpeace, aujourd’hui à la Confédération Paysanne, il lutte contre le développement d’un projet de poulailler industriel près de chez lui et se bat aussi contre un projet éolien sur la commune. “Avant, j’idéalisais l’éolien mais en mettant le nez dedans je me suis rendu compte que c’est surtout une histoire d’argent”. Élu conseiller municipal de Longecourt en mars dernier, Stéphane dénonce un projet démesuré mené d’une manière obscure sans véritable concertation avec les élus et les habitants. “Il faut viser une production à échelle humaine. Aujourd’hui, l’objectif est avant tout de réduire notre consommation d’énergie plutôt que de continuer à en produire”, estime-t-il.
Avant la fin de son mandat de conseiller municipal, Stéphane s’est fixé trois objectifs : mettre fin au projet éolien sur la commune, éteindre l’éclairage public la nuit et mobiliser des forces vives pour poursuivre le développement d’un éco-hameau à l’entrée du village.  “Les lots sont viabilisés. Il ne manque plus qu’à trouver des personnes intéressées pour rejoindre le projet”, précise la maraîcher.

Améliorer les conditions de travail

Côté maraîchage, les projets ne manquent pas non plus. S’ils ne souhaitent pas cultiver plus de surface, Anna et Stéphane réfléchissent à des manières de travailler plus ergonomiques afin de limiter la difficulté des efforts et le temps de travail que ce soit dans les champs ou lors de la préparation et la vente de leurs légumes.
Bricoleur, Stéphane se consacre notamment au développement de petites machines auto-fabriquées avec le collectif L’Atelier Paysan. “Ce que j’aime dans le maraîchage, c’est que c’est diversifié. Chaque jour, les tâches sont différentes. Elles changent aussi en fonction de la saison.”

Angélique